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Marie
Donzel et Charlotte Ringrave, consultantes spécialisées
en gestion des conflits, viennent de publier un
ouvrage consacré au phénomène de harcèlement au
travail. L’occasion de nous livrer leur analyse
sur les spécificités que présente le secteur
public dans l’appréhension de ces questions avec
le fantasme selon lequel le harcèlement ne peut pas
se produire dans les administrations.
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Dans quel contexte avez-vous travaillé sur cet
ouvrage ? |
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Notre
activité nous conduit à mener des missions
de conseil, de formation et de recherche sur
l’ensemble des problématiques liées au
travail et plus globalement toutes les
transformations en cours actuellement. Nous
travaillons également sur tous les sujets liés
au harcèlement d’une manière générale et
nous avons remarqué que lorsque nos clients,
entreprises ou administrations font appel à
nos services, il y déjà des signaux faibles
ou des situations de harcèlement avérés.
Lorsque nous arrivons sur le terrain
d’intervention, nous posons les questions
que l’on n’ose pas forcément poser.
L’objectif est d’apporter des éléments
de réponses pour que les employeurs et
personnes qui doivent gérer ces situations
puissent avoir une sorte de boussole qui leur
permette d’agir. |
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Marie
Donzel et Charlotte Ringrave, autrices de Harcèlements
au travail : au-delà des clichés, analyser,
agir et prévenir les harcèlements en
entreprise et administration, paru aux éditions
Mardaga. |
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Vous intervenez également auprès
d’administrations. Avez-vous repéré
des spécificités propres au secteur
public ? |
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Absolument.
Le secteur public se considère comme spécifique
y compris sur les questions liées au harcèlement
au travail. Il subsiste une sorte de fantasme
qui laisse penser que ces situations ne
peuvent pas arriver au sein de
l’administration. On retrouve pourtant des
situations extrêmement similaires et
comparables dans le public comme dans le privé,
mais avec des motifs d’inquiétude tout
particulier lié au service public. On
constate, dans un premier temps, une forte
inertie des organisations et des structures hiérarchiques
dans lesquelles la cohabitation avec les
nouvelles générations est parfois plus
conflictuelle car la hiérarchie est très
normée, peut créer des fossés importants,
et engendrer des situations de harcèlement.
Par ailleurs, la dégradation générale des
services publics est propice à des
interactions plus difficiles notamment avec
des parties prenantes externes. Or, une
relation difficile avec les usagers peut créer
une fragilisation des collectifs en interne et
peut être même un terrain fertile au développement
de comportements dysfonctionnels. Enfin, le
secteur public présente la particularité
d’être dépendant des politiques publiques
ou encore de l’agenda des élus. Un contexte
dans lequel plusieurs leaderships s’exercent
ce qui laisse des interstices dans lesquels
les personnes dysfonctionnelles peuvent
s’immiscer pour jouer sur plusieurs
tableaux. On remarque aussi une sorte
d’impunité liée à l’emploi à vie
d’un côté et de l’autre la peur de dénoncer
et de détruire une carrière car dans le
secteur public, la sentence est bien souvent
radicale. |
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Comment abordez-vous des situations entre ce
sentiment d’impunité de la part des
agisseurs et du côté des victimes, des
freins à la dénonciation de peur de détruire
une carrière ? |
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Dans la
fonction publique, il n’y a pas d’éventail
de sanctions possibles et bien souvent c’est
le couperet pour les professionnels qui se
sont rendus coupables de faits de harcèlement.
Face à ces situations, on propose parfois la
médiation car de nombreuses situations
peuvent être réglées par ce biais. Plus
loin, cette notion de mission des agents du
service public est réelle et admirable, mais
c’est aussi un terrain fertile aux burn-out
et à la manipulation des individus. |
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