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La
covid-19 va-t-elle changer l’école ?
Selon Annie Toudic, présidente du
Snec-CFTC, les relations parents-profs se
sont pacifiées et le numérique
s’impose dans la pédagogie. Mais dès
l’année prochaine, il faudra repérer
les lacunes des élèves, et profiter de
la crise pour intensifier la
sensibilisation à l’écologie.
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Comment se passe le retour des élèves
en classe dans les établissements ? |
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Nous
avons réalisé une enquête auprès des
enseignants du premier degré et des collèges.
Il s’agissait d’évaluer le respect du
protocole sanitaire du ministère de l’Education
nationale. Et pour 75 % à 80 % des personnes
interrogées, cela se passe plutôt bien. Par
exemple, 80 % se sentent en sécurité. Par
rapport à toutes les inquiétudes qui ont été
exprimées avant le déconfinement, c’est
plutôt rassurant. Cela dit, 20 % de personnes
qui ne se sentent pas en sécurité, ce
n’est pas non plus négligeable. Il y a
toujours un certain nombre d’établissements
où les règles ne sont pas respectées. |
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Tous les élèves ne peuvent pas revenir
dans leur établissement. Comment sont sélectionnés
ceux qui retournent en cours ? |
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Globalement,
cela repose sur le choix des familles et
l’organisation mise en œuvre dans chaque établissement.
Mais l’objectif du gouvernement était de
ramener à l’école les élèves qui sont
dans les situations les plus défavorisées.
Or ce sont plutôt ceux venant des zones
favorisées qui reviennent. Donc l’objectif
n’est pas atteint actuellement.
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De plus en plus de parents se plaignent
de ne pas pouvoir remettre leurs enfants
à l’école… |
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Avant
le 11 mai, il y avait beaucoup d’inquiétudes
de la part des parents. Puis ils ont vu que ça
se passait bien et cela les a rassurés. De
plus, beaucoup d’entre eux avaient la nécessité
de reprendre le travail. Si bien qu’ils sont
beaucoup plus nombreux maintenant à remettre
leurs enfants à l’école. Et aujourd’hui,
celle-ci ne peut pas répondre à toutes les
demandes.
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Les
enseignants doivent souvent mener de
front travail à distance et dans l’établissement.
Est-ce qu’ils s’en sortent ? |
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C’est
une des grosses difficultés. Dans ses
interventions, le ministère a assuré que les
enseignants n’avaient pas à assumer à la
fois présentiel et distanciel. Certains établissements
se sont organisés pour que cette consigne
soit respectée. Mais dans les faits, un tiers
seulement des enseignants ont un planning
habituel, et deux tiers voient leur temps de
travail augmenter. Ils rencontrent aussi
d’autres difficultés. 20 % d’entre eux,
environ, n’ont pas de pause à midi, parce
qu’ils doivent surveiller les élèves qui
prennent leur repas dans la classe. Et 40 %
n’ont pas de pause au milieu de la
demi-journée.
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Le Secrétariat général de l’enseignement
a demandé aux enseignants d’inviter les élèves
à s’exprimer sur la période du
confinement… |
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Oui
mais par moments nous avons été en désaccord
avec le SGEC. Celui-ci a par exemple fortement
incité les établissements à accueillir,
pendant le confinement, les enfants de
soignants. Mais sans mener la réflexion que
nous demandions sur la mise en œuvre de cet
accueil. Nous étions – et nous sommes
toujours – attachés, en tant que syndicat,
à ce que les salariés travaillent dans de
bonnes conditions. Le déconfinement a donné
l’occasion de mettre en œuvre les CSE et
les CSSCT . Nous pouvons donc nous exprimer au
sein des établissements lorsque ces instances
existent et fonctionnent réellement.
En revanche, nous n’avons pas les moyens de
nous faire entendre de l’Education
nationale, qui est pourtant notre employeur.
Les CHSCT académiques ne sont en effet pas
ouverts aux enseignants du privé. C’est
pourquoi nous avons demandé que les
commissions consultatives mixtes académiques
abordent la reprise d’activité. Cela a été
accepté. Mais ensuite, la qualité de la
consultation dépend des rectorats qui ont
chacun une certaine autonomie de
fonctionnement
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Quels seront les effets du confinement
sur l’année scolaire à venir ?
Faudra-t-il adapter les programmes ?
Faire redoubler les élèves les plus en
difficulté ? |
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L’enseignement
à distance n’a pas remplacé le présentiel
donc il faudra adapter le programme
d’enseignement. La première chose à faire
sera de repérer les difficultés et les
lacunes des élèves. C’est sur cette base
que les professeurs feront leur programmation
pédagogique. Ensuite, le rattrapage s’étalera
sur l’année, afin qu’il soit résorbé en
juin 2021.
Concernant les élèves les plus en difficulté,
il est peu probable qu’ils redoublent car
globalement, le redoublement doit rester
exceptionnel. Malheureusement, il est possible
qu’ils gardent leur retard pendant toute
leur scolarité. Mais le problème du décrochage
scolaire est permanent.
Sur ce point, nous ne sommes pas toujours en
phase avec le ministère de l’Education
nationale. Celui-ci a mis en place, il y a
quelques années, ses évaluations standardisées
des acquis des élèves. Or dans certains
lieux, les enseignants avaient déjà leurs
propres outils pour réaliser un diagnostic
plus fin. Le Snec-CFTC voulait que soit donné
le choix de l’outil dès lors qu’un
diagnostic était réalisé. Mais nous
n’avons pas été entendus par le ministère.
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Le
SGEC invite à “réinventer l’école”.
Qu’est-ce qui sera différent désormais ?
Les relations parents-professeurs, par exemple
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Le
confinement a provoqué une redécouverte du rôle
irremplaçable de l’enseignant, et de
l’importance de la classe dans
l’acquisition des connaissances. Les
interactions sont en effet très importantes
dans les apprentissages. Nous le disions déjà
avant. Mais les relations régulières
qu’ils ont eues entre eux pendant le
confinement ont changé le regard des familles
sur les enseignants, qui se sentaient mal
reconnus. Auparavant, les professeurs
trouvaient que les parents remettaient trop en
cause les méthodes d’enseignement. Il y
avait une méfiance de part et d’autre.
Maintenant, les familles savent qu’enseigner
est un métier, avec une technique, qui est la
maîtrise de la pédagogie. Il faut une médiation,
par rapport au savoir.
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Dans l’avenir, quelle pourrait être
la place du numérique à l’école ? |
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Pendant le confinement, le numérique a été une préoccupation des
collectivités territoriales. Celles qui sont
dans les fameuses zones blanches espèrent que
la crise de la covid-19 va permettre d’accélérer
la couverture du territoire en connexions à
haut débit. Il est probable aussi qu’une réflexion
soit menée sur les équipements des familles.
Quant aux enseignants, le numérique permet de
diversifier la pédagogie et les situations
d’apprentissage. Le confinement a aussi dédramatisé
l’utilisation du numérique chez les
enseignants les plus réticents. Ils s’aperçoivent
que ce n’est pas si compliqué. Pour les élèves,
le numérique peut aussi donner accès à des
enseignements qui ne sont pas proposés par
leur établissement.
Donc la crise de la covid, je pense, va donner
un coup d’accélérateur à l’utilisation
du numérique. Cela étant dit, il s’agit,
pour les enseignants, de se former. Avec le
numérique, on ne construit pas sa pédagogie
de la même façon. Et cela, tous ne l’ont
pas compris car ils n’ont pas été formés
pour cela, ce qui a pu parfois augmenter leur
temps de travail.
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Annie
Toudic,
présidente
du Snec-CFTC
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